La Pietà d'Avignon, par Nicolas Grimaldi


          « Point de décor ici. Ni ville, ni paysage : la douleur a anéanti toute différence ; ce qui était le foisonnement et la diversité du monde n'est plus qu'un uniforme désert. Ni orient, ni occident : venant d'En haut, une immuable lumière a solidifié le ciel et calciné la terre. Ni végétation, ni passereaux, ni heure, ni saison : désormais plus rien ne passera ; plus rien n'est à venir ; demain est hier. En cet univers stupéfié le temps est abrogé. Ni Pharisien ni Romain, ni maître ni serviteur, ni artisan ni passant : plus rien n'est visible ici de ce que naguère encore on avait nommé la vie. Madeleine comme le donateur : en ce nouveau monde nul n'advient, n'est visible, ni ne demeure que par l'espérance et la foi. Aussi venons-nous à douter si cette cité dorée qui se silhouette au loin dans le ciel d'or est le dernier éclat de la Jérusalem terrestre qui disparaît, ou l'apparition glorieuse, à l'horizon même de la vie, de la Cité de Dieu. »
Nicolas Grimaldi, L'Art ou la feinte passion


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